De la révolte à la beauté
Les différents conflits de notre nature
Hier, je reprenais ma lecture de La Vie Divine et découvrait deux paragraphes sur les différents conflits de notre nature.
Chapitre 24 – La Matière
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Il semble en vérité que le corps soit depuis le début la grande difficulté de l’âme, la pierre d’achoppement et l’écueil où elle se heurte constamment. C’est pourquoi ceux qui, pleins d’ardeur, se sont mis en quête de la réalisation spirituelle ont jeté leur anathème sur le corps, et, dans leur dégoût du monde, ils vouent une haine toute particulière à ce principe universel.
Le corps est l’obscur fardeau qu’ils ne peuvent porter ; l’irréductible grossièreté matérielle est l’obsession qui les conduit à chercher leur délivrance dans la vie ascétique. Pour s’en débarrasser, ils sont même allés jusqu’à nier son existence, et la réalité de l’univers matériel. La plupart des religions ont maudit la Matière, et elles ont fait du renoncement à l’existence physique, ou de son acceptation résignée et provisoire, la mesure de la vérité religieuse et de la spiritualité.
Plus patientes, plus profondes en leur méditation, à l’abri de la torture et de la fiévreuse impatience de l’âme sous le fardeau de l’âge de Fer, les croyances plus anciennes ne faisaient pas cette redoutable division ; elles reconnaissaient en la Terre la Mère et en le Ciel le Père, et leur vouaient un amour égal, une égale révérence ; mais leurs antiques mystères sont obscurs, et notre regard ne peut les sonder ; que notre vision des choses soit matérialiste ou spirituelle, nous sommes également satisfaits de trancher le nœud gordien du problème de l’existence d’un seul coup décisif et de nous évader dans une béatitude éternelle, ou d’en finir par un anéantissement ou un apaisement éternels.
Paragraphe suivant
En fait, ce conflit ne commence pas avec l’éveil à nos possibilités spirituelles ; il débute avec l’apparition de la vie elle-même, avec sa lutte pour établir ses activités et ses agrégats permanents de forme vivante contre la force d’inertie, la force d’inconscience, la force de désintégration atomique qui, dans le principe matériel, constituent le nœud de la grande Négation.
La Vie est constamment en guerre avec la Matière, et le combat semble toujours se terminer par l’apparente défaite de la Vie et l’écroulement, la rechute vers le principe matériel que nous appelons mort.
La discorde s’accentue avec l’apparition du Mental ; car le Mental est en conflit avec la Vie et avec la Matière ; il est perpétuellement en guerre contre leurs limitations, perpétuellement révolté contre la grossièreté et l’inertie de l’une, les passions et les souffrances de l’autre auxquelles il est assujetti ; et la bataille semble finalement s’orienter vers la victoire partielle et coûteuse — et pas même assurée — du Mental qui conquiert, réprime, ou va même jusqu’à supprimer les appétits du vital, altère la force physique et perturbe l’équilibre du corps au profit d’une plus grande activité mentale et d’une existence morale supérieure.
C’est dans cette lutte que se manifestent l’impatience à l’égard de la Vie, le dégoût pour le corps et la volonté de s’en détacher pour se tourner vers une pure existence mentale et morale.
Lorsque l’homme s’éveille à une existence par-delà le Mental, il pousse encore plus loin ce principe de discorde.
Le Mental, le Corps et la Vie sont condamnés en tant que trinité du monde, de la chair et du diable. Le Mental est lui aussi banni, sous prétexte qu’il est la source de tous nos maux. La guerre est déclarée entre l’esprit et ses instruments, et l’on recherche la victoire de l’Habitant spirituel par une évasion hors de son étroite résidence, un rejet du mental, de la vie et du corps et un retrait en ses propres infinitudes.
Le monde est discorde, et c’est en portant le principe même de la discorde jusqu’à ses possibilités les plus extrêmes, en nous coupant du monde jusqu’à la rupture finale, que nous en résoudrons le mieux les perplexités.
Commentaire personnel
La semaine dernière je faisais une magnifique expérience avec la Terre-Mère, et hier je lisais Sri Aurobindo rappeler les anciennes croyances qui faisaient de la Terre la Mère et du Ciel le Père.
De même, je faisais quelques remarques sur les apparences fluctuantes entre la défaite et la victoire et Sri Aurobindo continuait les paragraphes plus haut en écrivant : Mais ces défaites et ces victoires ne sont qu’apparentes, et cette solution n’en est pas une, car elle élude le problème.
Ça va, cela me rassure...😊, je suis un peu relié. Ce qui me parait plus étrange, c'est l'invitation de Sri Aurobindo à pousser le principe de discorde jusqu'à ses possibilités les plus extrêmes. Cela mérite réflexion...
En tout cas, ces deux paragraphes m'ont touché en ce sens que je ressens de façon très intime et très profonde ces conflits internes entre les différentes parties de l'être. C'est douloureux, souvent désespérant, comme l'énigme de la vie, pas encore résolue...
Et ce matin, je me suis encore réveillé avec ça.
De temps en temps, je tire une carte des Bénédictions de Mère, elles sont souvent un baume au coeur. Et ce matin j'ai reçu la carte...
DIFFICULTÉS
Mon cher enfant
Toutes les difficultés sont là pour tester l'endurance de la foi. Les difficultés qui vous touchent sont exactement proportionnelles à votre force. Des difficultés nous sont envoyées exclusivement pour rendre la réalisation plus parfaite. Plus la difficulté est grande, plus la victoire est grande. Endure et tu triompheras.
Avec tout mon amour et mes bénédictions
Méditation nocturne
Réveillé au milieu de la nuit après quelques heures de sommeil, je me suis assis en méditation. Souvent, quand je suis reposé, il se passe de belles choses, je suis plus calme alors c'est plus profond.
Assez rapidement est revenu cette sensation d'être assis dans le ciel. Encore cette impression que ma conscience devient claire et s'élève, s'ouvre dans une conscience très vaste, comme le ciel...
Sur cette base, cette fois-ci, j'ai procédé un peu différemment.
D'habitude, je ne sais pas, c'est comme si ma conscience était tournée vers l'extérieur et restait simplement à regarder, contempler cette immensité...
Là, je faisais une sorte d'effort pour, physiquement m'ouvrir, me détendre, m'ouvrir à cette immensité paisible, pour que le corps reçoive, devienne une éponge...
Au bout d'un moment, j'ai réussi à mettre des mots sur les sensations que je ressentais et je me suis dit : là-dedans, je peux me relâcher.
Il y a quelque chose dans la conscience qui se disait, dans cet espace-là, je peux me relâcher, je peux me laisser aller...
Je peux me laisser aller...
Avec le recul, cette sensation de pouvoir se laisser aller est très rare. Je ne suis même pas certain de l'avoir déjà vécu.
Même dans les moments de calme, de détente, il y a toujours quelque chose, quelqu'un, un point dans la conscience qui semble rester sur le qui vive, à surveiller, contrôler, rester sur ses gardes, aux cas où. À vrai dire, je ne sais pas trop ce que c'est. Et bien, pour une fois, cette partie de l'être se disait : je peux me laisser aller.
C'était bon comme une bénédiction.
Mais cela n'a pas duré 😁
Parce qu'un autre travail a commencé dans une autre partie de l'être, au niveau du coeur, de l'énergie du coeur, de la conscience du coeur.
J'essayais d'induire ce même relâchement dans le coeur. J'essayais que le coeur s'ouvre lui aussi à cette immensité paisible. Je voulais cela parce que d'un seul coup, je réalisais que le coeur était inquiet, angoissé, triste, fermé... toutes sortes de choses.
Je cherchais la guérison du coeur.
Alors est venu comme une nuit autour du coeur. Paradoxalement, cela m'a presque rassuré car je me suis rappelé ces nombreuses paroles que la nuit se fait plus épaisse avant l'aurore.
En fait, ma conscience était focalisée sur l'étage de la poitrine et c'était comme si tout autour de la cage thoracique, il y avait un halo de nuit, de pénombre...
Et tout à coup, dans cette pénombre, j'ai eu la vision de petits bonhommes verts.... me faisant penser à des play mobile.
Enfant, je jouais au play mobile. Enfin bon, de là à ce que, 40 ans plus tard, ils apparaissent dans une méditation autour de mon coeur, c'est un peu curieux. Sûrement le symbole de quelque chose.
Il y en avait beaucoup, quelques dizaines, comme ça, semblant flotter autour de moi à la hauteur de la poitrine...
Et puis, le travail énergétique a changé, je ne me souviens plus, ils ont disparus...
En tout cas, le vert est la couleur du chakra du coeur, dans le système traditionnel. J'étais donc bien avec le coeur et non avec le psychique derrière le coeur qui lui, selon Sri Aurobindo a une couleur rosé-doré.
Et puis je me suis levé pour faire une pratique corporelle, cela faisait longtemps...
De la révolte à la beauté
Différents exercices d'assouplissements de la colonne vertébrale, quelques autres exercices selon mon inspiration, tout dans le calme, une concentration très tranquille de la conscience, façon qi gong, plusieurs fois entrecoupés d'une sensation de révolte assez intense...
Alors, je rentrais doucement dans l'immobilité, pour regarder, écouter, ressentir...
Sur le plan psychologique, cette révolte est peut-être lié à ce que l'on appelle un conflit d'incarnation, quelque chose comme ça. Quelque chose semble dire : je n'ai pas envie d'être là, ça me fait chier d'être là, je veux rentrer à la maison...
Ça grogne, ça se plaint, ça gémit, ça n'est pas content, ça en a marre... comme la révolte d'un soldat parachuté dans une guerre à laquelle il ne comprend strictement rien, face à des ennemis semblant avoir accumulés des moyens de destruction surpuissants....
Mais à vrai dire, cet aspect psychologique ne m'intéresse pas beaucoup, ce n'est pas sur ce plan-là que doit être la racine...
Le psychologique, c'est encore très bruyant et les mots que j'emploie sont exacts dans la vibration mais tout à fait exagérés dans la sensation...
J'étais face, ou avec, une révolte beaucoup plus profonde, plus intime et plus discrète. J'étais dans une pratique corporelle et cela me semblait être une révolte du corps, émanant du corps.
Cela ne ressemblait pas au vital, on aurait dit que cela venait de la substance. En fait, cela me rappelait Mère qui disait que la substance européenne était pleine de révolte alors que la substance indienne était tempérée par le surrender.
En fait, c'est ça, exactement ça que je ressentais dans le corps, une profonde révolte. Une révolte sans rien de la grandiloquence des révoltes intellectuelles ou passionnées du vital ; je les connais aussi. Une révolte toute petite, à l'échelle des cellules, mais tellement intime, tellement profonde que l'on peu passer sa vie sans s'en rendre compte ; c'est tout à fait en-dessous de l'existence apparente, de la vie ordinaire que nous menons...
Alors, plutôt que d'enter en guerre, je me suis mis à l'écoute de ça. J'aurais pu arrêter ma pratique et aller m'acheter des croissants aux amandes et regarder un film et penser à autre chose, ce que j'ai fais plus tard d'ailleurs, mais en attendant, je voulais rester en contact avec cette révolte.
Et j'étais bien embêté. Je ne savais que faire. Alors je ne faisais rien si ce n'est faire très attention à bien rester avec.
L'attitude intérieure ressemblait à la présence silencieuse d'un ami avec quelqu'un qui souffre. J'étais avec cette révolte et avec mon impuissance, très calme, très tranquille. Présence silencieuse.
Alors la révolte se calmait et je reprenais ma pratique corporelle. Et quelques minutes plus tard, un nouveau mouvement de révolte se levait du corps. Alors tranquillement, je rentrais à nouveau dans l'immobilité pour me mettre à l'écoute de cette révolte.
Ces mouvements de révolte sont revenus par vague, trois ou quatre fois dans ma pratique...
Ne sachant que faire je ne pouvais être qu'avec ce qui est. À un moment donné, je ne cherchais même plus à apporter une solution à ces mouvements intérieurs de révolte.
Parce qu'au début, il y avait quand même une partie de la conscience qui cherchait une solution, qui se demandait quelle vibration pouvait guérir ça, et patati et patata. On veut aider, on veut soulager, on veut guérir, on veut, on veut, on veut...
Je ne cherchais plus de solution.
Alors il s'est passé quelque chose à laquelle je ne m'attendais pas....
Il est venu une sensation accompagnée des mots :
"beauté cachée"...
Cela me racontait qu'il y avait dans cette révolte une beauté cachée, ou alors, cela m'expliquait, me faisait sentir que la guérison de cette révolte pouvait venir de la découverte, d'une beauté cachée...
Dans le corps, dans le tissus même de cette existence matérielle, une beauté cachée...
J'étais très ému, comme s'il n'y avait que la beauté qui pouvait faire fondre la résistance du monde...
De la révolte à la beauté...