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Publié par pascalemmanuel

En écoutant les uns et les autres, je me suis rendu compte qu'il y avait de temps en temps l'idée, en gros, que tout le malheur qui nous accable viendrait des hommes, sous-entendu que tout ce qui relève du Divin ne serait que paix, joie, lumière, amour etc.

Avec par ailleurs une insistance assez régulière sur la nécessité pour les hommes de prendre leurs responsabilités, avec des menaces à peine voilées sur les conséquences néfastes que pourraient entraîner de mauvais choix.

Alors évidemment, il y a une vérité là derrière et il ne viendrait à personne de préconiser l'irresponsabilité. Pourtant, cette attitude me donnait aussi l'impression de jeter un bien lourd fardeau sur les épaules des humains et j'ai voulu regarder la question de plus près.

Voici quelques passages que j'ai trouvé dans La vie divine de Sri Aurobindo :

Le Brahman est indivisible en toutes choses et finalement tout ce qui est voulu dans le monde, a été voulu par le Brahman. C’est seulement notre conscience relative, alarmée ou déconcertée par les phénomènes du mal, de l’ignorance et de la douleur dans le cosmos, qui essaie de libérer le Brahman de sa responsabilité vis-à-vis de Lui-même et de ses œuvres, en érigeant un principe opposé, Mâyâ ou Mâra, Diable conscient ou principe du mal existant en soi. Il y a un seul Seigneur, un seul Moi, et le multiple n’est autre que Ses représentations et Ses devenirs. (Page 45)

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Toutes ces choses que nous voyons autour de nous sont donc les pensées d’une Divinité extracosmique, d’un Être doué d’un Mental et d’une Volonté omnipotents et omniscients, qui est responsable de la loi mathématique de l’univers physique, de son œuvre d’art et de beauté, de son jeu étrange d’identité et de variations, de concordances et de discordances, d’opposés qui se combinent et s’entremêlent, responsable du drame de la conscience qui lutte pour exister et cherche à s’affirmer au sein d’un ordre universel inconscient. (Page 338)

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Si nous admettons qu’il existe un gouvernement divin de l’univers, nous devons en conclure que ce pouvoir de gouverner est total et absolu, car autrement nous serions obligés d’imaginer un être et une conscience infinis et absolus, qui posséderaient une connaissance et une volonté limitées dans leur contrôle des choses, ou entravées dans leur pouvoir d’action.

Il n’est pas impossible de concéder que la Divinité immanente et suprême puisse laisser une certaine liberté d’action à quelque chose qui est né en sa divine perfection, mais qui est soi-même imparfait et cause d’imperfection, à une Nature ignorante ou inconsciente, à l’action du mental et du vouloir humains, et même à un Pouvoir conscient ou à des Forces de ténèbres et du mal conscientes qui s’appuient sur le règne d’une Inconscience fondamentale.

Mais aucune de ces choses n’est indépendante de Son existence, de Sa nature et de Sa conscience, et nulle ne peut agir qu’en Sa présence et avec Son consentement ou Son autorisation.

La liberté de l’homme est relative et il ne peut être tenu pour seul responsable de l’imperfection de sa nature.

L’ignorance et l’inconscience de la Nature sont apparues non pas indépendamment, mais dans l’Être unique ; l’imperfection des activités de la Nature ne peut être entièrement étrangère à quelque volonté de l’Immanence.

On peut concéder que les forces mises en mouvement sont laissées libres de s’accomplir selon la loi de ce mouvement ; mais ce que l’Omniscience et l’Omnipotence divines, ont laissé apparaître et agir en Son omniprésence et Sa toute-existence, nous devons considérer que c’est Lui qui en est l’origine et qui l’a voulu, puisque sans le fiat de l’Être ces forces n’auraient pu être et ne pourraient continuer d’exister.

Si le Divin se soucie tant soit peu du monde qu’Il a manifesté, il n’est d’autre Seigneur que Lui et l’on ne peut finalement échapper à cette nécessité de Son être originel et universel, ni s’en détourner.

C’est en nous fondant sur cette conséquence évidente de nos prémisses de base, sans éluder aucune de ses implications, que nous devons considérer le problème de l’imperfection, de la souffrance et du mal. (Page 435)

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Telle est donc la loi de la manifestation, la cause de l’imperfection en ce monde.

Sans doute n’est-ce qu’une loi de manifestation, et même une loi particulière à ce mouvement où nous vivons, et nous pouvons dire qu’elle aurait pu ne pas être — s’il n’y avait pas eu de mouvement de manifestation, ou pas ce mouvement-ci ; mais la manifestation et le mouvement étant une réalité, la loi est nécessaire.

Il ne suffit pas de dire que la loi et toutes ses circonstances sont une irréalité créée par la conscience mentale, qu’elles n’existent pas en Dieu et qu’être indifférent à ces dualités ou sortir de la manifestation pour entrer dans l’être pur de Dieu, est la seule sagesse.

Il est vrai que ce sont des créations de la Conscience mentale, mais le Mental ne porte qu’une responsabilité secondaire ; dans une réalité plus profonde, elles sont, comme nous l’avons déjà vu, des créations de la Conscience divine projetant le mental hors de sa toute-connaissance de façon à réaliser ces valeurs opposées ou contraires de sa toute-puissance, de sa toute-connaissance, de sa toute-félicité, de sa toute-existence et de son unité. (Page 441)

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En effet, il serait entièrement faux de prétendre que tout ce qui n’est pas préservé et utilisé est détruit et anéanti, disparaît sans laisser de trace et n’a servi à rien. La Nature elle-même en a tranquillement utilisé une grande part pour notre formation, et cela stimule la masse assez importante de notre croissance, de notre devenir et de notre action dont notre mémoire, notre volonté et notre intelligence conscientes ne sont pas responsables. (Page 594)

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Si l’on demande pourquoi seules les actions, bonnes ou mauvaises, doivent avoir un résultat, nous devons admettre que les pensées, les sentiments, les actes, bons ou mauvais, ont tous, eux aussi, des conséquences correspondantes ; mais puisque les actions constituent la majeure partie de la vie, qu’elles mettent à l’épreuve les valeurs existentielles de l’homme et expriment leur pouvoir, et puisque l’homme n’est pas toujours responsable de ses pensées et de ses sentiments — qui sont souvent involontaires —, mais est ou doit être tenu pour responsable de ses actes dans la mesure où ils font l’objet d’un choix, c’est surtout par ses actions que l’homme construit son destin ; elles sont les principaux ou les plus puissants déterminants de son être et de son avenir. C’est toute la loi du Karma. (Page 857)

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En conclusion, si l'homme est capable de bien des horreurs, il est tout à fait injuste de le rendre responsable de l'existence du mal. Et pour terminer ce premier tour d'horizon, dans le glossaire des termes sanskrits, page 1128, il apparait un dernier élément ; excellente transition avec les passages de Mère trouvés dans L'Agenda qui vont apporter un éclairage singulièrement différent. 

bâlavat – comme un enfant ; état de non-responsabilité pur, parfait, béatifique.

Lien vers le PDF de La Vie Divine

Passiflora vitifolia – Fleur de la passion – L'aspiration du pouvoir à devenir un instrument de l'œuvre divine – Le pouvoir s'ouvrant à une conscience supérieure, s'éveille au besoin d'être au service du Divin.

Voyons maintenant quelques extraits de L'Agenda.

Agenda du 8 octobre 1956

On n’est jamais qu’un apprenti divin : le Divin d’hier n’est qu’un apprenti pour le Divin de demain... Non, je ne parle pas d’une manifestation progressive : cela, c’est beaucoup plus bas.

Quand je suis au sommet de moi-même, je suis déjà trop haut pour la manifestation.

Je suis passée bien au-delà de ce que j’avais écrit ce matin.

Satprem : Si l’humain est trop lourd, trop étroit, trop obscur pour te suivre ?

C’est justement le contraire de ce que tu viens de dire ; non pas que le Divin dans sa divinité s’oppose à Lui-même manifesté : Il va très au-delà, au-delà de la nécessité de la Grâce ; Il perçoit l’unique et exclusive responsabilité ; et que c’est Lui-même et Lui seul qui doit changer dans Sa Manifestation pour que tout change.

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Agenda du 19 janvier 1963

C'est ce que je dis toujours aux gens qui critiquent le gouvernement : «Vous mériteriez qu'on vous mette à la place du Premier Ministre, ou de tel ou tel autre ministre, à prendre des décisions, et puis que vous ayez la responsabilité et que vous vous trouviez tout d'un coup obligé de décider de choses que vous ne savez pas, vous verriez comme c'est gai !» N'est-ce pas, pour gouverner convenablement, il faut être... il faut être un sage ! Il faut avoir une vision universelle, il faut être au-dessus de toutes les questions personnelles... Il n'y en a pas un – pas un. (*)

Il y en a qui sont amorphes (ce sont les meilleurs parce que ceux-là, je peux leur faire faire ce que je veux) ; ils sont comme des automates, alors on peut en faire quelque chose ; mais malheureusement ils se croient... justement ils ont le sens de leur responsabilité et ils se croient très supérieurs, alors là c'est terrible !

(*). Cet Agenda-là est une découverte inattendue en ce sens qu'il n'est pas dans le sujet que je souhaite aborder. Je le laisse comme une indication pour... le monde d'après, quand il s'agira de réinventer et reconstruire. J'espère bien que les peuples choisiront leurs dirigeants sur de nouvelles bases. Vous le sauriez vous, sur quelles bases il faut les choisir ? Mère nous donne une première réponse, c'est intéressant.

Ailleurs, Elle insiste à nouveau sur une totale absence de préférences personnelles et la capacité d'écouter les indications qui viennent d'en haut, de la Conscience divine. 

Continuons 😊.

Agenda du 23 novembre 1965

Et c'est pour cela qu'il est si difficile de savoir comment il faut être. Parce que, dans la pensée, on peut être toujours dans le même état, même dans l'aspiration on peut être toujours dans le même état, dans la bonne volonté générale, même dans la soumission au Divin, tout cela peut être la même chose, dans le même état – c'est là-dedans (Mère touche son corps) et ça fait toute la différence.

Je conçois très bien qu'il y ait des gens en qui cette opposition persiste dans le mental et dans le vital, mais là c'est tellement évident... Mais moi, je parle d'une chose tout à fait matérielle.

Il y a des gens qui disent et qui pensent : «Comment ? je suis de si bonne volonté, je veux tellement bien faire, et puis rien ne réussit, tout est discordant, pourquoi ? Je suis si bon (!) et les choses ne répondent pas.»

Ou ceux qui disent : «Oh! j'ai fait ma soumission, je suis de si bonne volonté, j'ai une aspiration, je ne veux que la Vérité et le Bien, et puis je suis tout le temps malade, pourquoi est-ce que je suis malade ?»

Et naturellement, un petit pas de plus, et on commence à douter de la Justice qui régit le monde, etc. Alors on tombe dans un trou...

Mais ce n'est pas cela. Ce n'est pas cela que je veux dire. C'est à la fois beaucoup plus simple et beaucoup plus difficile, parce que ce n'est pas criant, ce n'est pas évident, ce n'est pas une opposition où l'on puisse choisir, c'est... vraiment, totalement, intégralement, laisser toute la responsabilité au Seigneur. (*)

De toutes choses, pour l'homme, c'est la plus difficile – c'est beaucoup plus facile pour la plante et même pour l'animal, beaucoup plus. Mais pour l'homme, c'est très difficile. Parce qu'il y a eu toute une période de l'évolution où il a été nécessaire qu'il prenne la responsabilité de lui-même pour progresser. Alors l'habitude est prise, c'est incrusté dans l'être.

(*). Je ne sais pas. Je ne comprends pas pourquoi je trouve cela si beau, si fort que cela me donne envie de pleurer. Cela en est douloureux tellement c'est beau. Comprends pas. Continuons. 

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Agenda du 19 octobre 1967

La foi mentale, ça ne suffit pas, il faut l'élan psychique – le don de soi, l'abnégation. Le corps lui-même est en train d'apprendre que chaque fois qu'il pense à lui-même, il y a une petite catastrophe – pas «catastrophe», mais je veux dire à la proportion du corps : catastrophe cellulaire, chaque fois qu'il a un petit retour sur soi. Il faut qu'il s'oublie complètement, qu'il s'oublie, et surtout-surtout pas essayer de trouver le support, le confort, la compréhension, l'aide, rien comme cela (geste horizontal et autour), seulement là (geste paumes ouvertes vers le haut, les deux mains faisant comme un triangle pointe en bas) : le seul soutien, c'est le Divin. Le seul soutien. La seule aide, la seule responsabilité. Tout le reste... Il n'y a pas une chose venant d'un être humain ou vers un être humain qui ne soit mélangée ; et mélangé, ça veut dire le conflit.

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Agenda du 25 octobre 1967

Maintenant, intégralement, y compris la conscience la plus matérielle, la conscience corporelle, c'est : laisser toute la responsabilité au Seigneur – ce qu'il veut, sera, et puis voilà tout. Quand Il veut que l'on fasse quelque chose, on le fait, mais après tout... Simplement on le fait parce qu'il vous dit de le faire. Et puis il arrivera ce qui arrivera. Et alors, si l'on a envie de savoir, on se met dans l'attitude du Témoin et on regarde. Et ça, c'est très amusant ! Dès que l'on est dans l'attitude du Témoin, c'est très intéressant – très intéressant – et on a le sourire.

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Agenda du 25 mars 1970

N'est-ce pas, l'idée est qu'à Auroville, il n'y aura pas de douanes et pas d'impôts, et que les Auroviliens n'auront pas de propriété personnelle. Comme cela, sur le papier, c'est très bien, mais quand il s'agit de le faire pratiquement...

Et le problème est toujours le même : la responsabilité devrait incomber à ceux qui ont une conscience... universelle, n'est-ce pas, autrement... Partout où il y a la conscience personnelle, c'est un être incapable de gouverner – nous voyons comment sont les gouvernements, c'est effroyable !

 

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Agenda du 29 mars 1972

(Extrait d'une lettre de Satprem à André Malraux)

Je voudrais vous citer ici un passage des Essais sur la Gitâ de Sri Aurobindo, qui jette une claire lumière sur le problème : «Ce sont des expédients maladroits et trop commodes ceux qui prétendent mettre sur le dos d’un Diable semi-omnipotent la responsabilité de tout ce qui nous semble mal ou terrible, ou qui rejettent ces choses comme faisant partie de la Nature, créant ainsi une opposition insurmontable entre la nature du monde et la nature de Dieu, comme si la Nature était indépendante de Dieu ; ou ceux qui prétendent encore rejeter cette responsabilité sur l’homme et ses péchés, comme si l’homme avait eu son mot à dire dans la fabrication du monde et comme s’il pouvait créer quoi que ce soit contre la Volonté de Dieu...

Il faut regarder la réalité courageusement en face et voir que c’est Dieu, et personne d’autre, qui a fait ce monde dans son être et qu’il l’a fait ainsi.

Il faut voir que la Nature qui dévore ses enfants, le temps qui se repaît de la vie des créatures, la Mort universelle et inéluctable et la violence des forces de Roudra dans l’homme et dans la Nature sont aussi la suprême Divinité sous l’un de ses aspects cosmiques.

Il faut voir que Dieu le bienfaisant et prodigue créateur, Dieu qui aide, le sauveur puissant et miséricordieux, est aussi Dieu qui dévore et Dieu qui détruit.

Le tourment du lit d’angoisse et le mal qui nous tenaille sont la pression de Sa main, autant que la joie et la douceur et le plaisir.

C’est seulement lorsque nous voyons avec les yeux de la complète union et sentons cette vérité jusque dans les profondeurs de notre être, que nous pouvons aussi découvrir totalement, derrière ce masque, le calme et beau visage de la Divinité qui est Toute-Félicité et découvrir dans la pression de Sa main qui met à l’épreuve notre imperfection, le geste de l’ami et celui du constructeur de l’esprit dans l’homme.

Les discordes de ce monde sont les discordes de Dieu et c’est seulement en les acceptant et en progressant à travers elles que nous pourrons arriver aux plus hauts accords de sa suprême harmonie.» 

Lien vers la lettre en intégralité

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Voilà, je voulais rassembler ces extraits qui apportent un éclairage différent, à la fois sur la situation que nous traversons, aussi bien sur le plan collectif que sur le plan du processus intérieur. 

Que la Présence divine nous éclaire et nous guide... 

Aum namo bhagavaté

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