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Publié par pascalemmanuel

L'Agenda du 26 novembre 1960 apporte un élément très important pour la conquête de notre santé. Il commence par une introduction de Satprem.

 

(Mère avait décidé que cet entretien personnel devait être détruit – la bande magnétique effacée – mais étant donné son importance, nous avons cru bon de la préserver.)

Satprem : Ta force m’a guéri d’une façon vraiment spectaculaire, en l’espace d’une heure. Si encore tu avais guéri ma grippe seulement, je comprendrais, parce que c’est une chose générale et qu’avec une bonne vibration générale on enlève cela, mais la force a agi avec une précision, une exactitude surprenantes : d’abord elle a nettoyé la grippe, puis elle a touché une dent malade qui me faisait souffrir depuis trois fours, et en cinq minutes c’était fini; enfin, j’avais un ligament abîmé – abîmé depuis trois ou quatre ans et qui me faisait périodiquement mal (exactement un ligament de la cuisse au point où il se rattache au bassin) et ce ligament me faisait si mal depuis huit jours que j’avais beaucoup de difficulté à m’asseoir en méditation les jambes croisées. Et j’ai senti la force qui venait toucher là, exactement ce point, et le mal avait disparu. C’était pourtant quelque chose d’organique, pas une maladie générale !...

 

(Mère reste silencieuse un moment, puis elle dit :)

 

Ce n’est pas la nuit dernière mais la nuit d’avant, j’ai touché au moins l’une des causes (à ce moment-là, cela me faisait l’effet de la cause) d’une certaine impuissance à agir directement sur la Matière...

 

N’est-ce pas, la Volonté, le Pouvoir viennent, ils sont extrêmement efficaces partout, jusqu’à un certain domaine (c’est-à-dire que les gens soient réceptifs ou pas réceptifs, ouverts ou pas ouverts, cela n’a aucune importance : quand la Volonté s’exerce jusqu’à un certain domaine, c’est tout-puissant), mais quand ça touche juste là, le plus matériel du matériel, l’efficacité dépend de beaucoup de choses – un pouvoir qui dépend n’est pas un pouvoir, n’est-ce pas !

 

Et il y a longtemps, longtemps que je suis à la recherche des causes de cette impuissance. J’en ai trouvé successivement un certain nombre et, immédiatement, sur ces points-là, l’effet a été complet.

 

Mais il y avait encore des choses qui résistaient (oh ! il y en a plusieurs, dans plusieurs directions) : comme l’action sur la maladie, sur les cellules, et l’action sur le doute (pas le doute mental : le doute de la conscience physique qui ne peut pas arriver à admettre certaines choses qui lui paraissent impossibles ; c’est ce que Sri Aurobindo appelle disbelief (incrédulité), pas un doute qui vient du Mental, c’est le «disbelief» de la conscience physique qui ne peut pas admettre ce qui est contraire à sa propre nature et à son propre fonctionnement). Et puis certaines maladies.

 

Quelquefois l’effet est immédiat sur une maladie, quelquefois ça traîne, et quelquefois il faut que ça suive son cours soi-disant normal. Sur ces trois points-là, je sentais bien qu’il y avait quelque chose qui empêchait. Ce sont les places fortes de l’Adversaire: tout ce qui ne veut pas du Divin se saisit de cela et ça obstrue même le fonctionnement du Pouvoir qui vient d’en haut parce que, quand il doit s’exécuter ici, dans le corps, c’est arrêté ou déformé ou altéré ou diminué.

 

Tout cela, ça se passe dans le subconscient ; ce sont des choses qui ont été rejetées de la conscience physique dans, le subconscient, et elles sont là et elles remontent quand ça leur plaît.

 

Il y a deux nuits (non, trois nuits : la nuit qui précédait le Darshan), j’ai eu une de ces expériences qui... qui vous laisse songeur pendant une journée entière...

 

(silence)

 

Je suis descendue au Darshan avec ça et, malgré toute ma volonté d’être aimable et d’avoir l’air gentil, j’étais comme une pierre, à regarder ça... Je ne peux pas en parler maintenant parce que c’est la clef d’une très grande chose.

 

(silence)

 

C’est le point sur lequel la Nature (je veux dire le côté passif de la force de manifestation) est l’esclave des forces adverses. Il y a un point sur lequel elle est dominée. Et il faut que ça, ce soit guérit pour que le Pouvoir d’en haut, le Pouvoir de la Shakti, puisse traverser tout et dominer tout, être infaillible...

 

La chose a été vue, l’expérience a été faite, mais cela prend quelquefois longtemps pour être... worked out (élaboré), toutes les conséquences de ça.

 

Mais immédiatement le lendemain, c’est-à-dire le jour du Darshan, à mesure que (n’est-ce pas, quelque chose était en train de travailler au-dedans), à mesure que ça se passait, je pouvais recommencer à m’occuper des gens qui étaient là. Et chose curieuse, au moment où, toi, tu es venu, il y a eu tout d’un coup une espèce de petit choc, comme un choc électrique, et une étincelle a jailli. Et à ce moment-là, le Pouvoir a agi, pendant peut-être un fragment de seconde...

 

Parce qu’il y avait, te concernant, ce mauvais Karma, cette vieille formation qui était là depuis très longtemps et qui n’avait... Je me souviens de t’avoir dit il y a plusieurs années : «C’est seulement quand le Supramental descendra que je pourrai guérir les cas comme le tien.»

 

Et c’était là, toujours vivant, avec ce sentiment d’incapacité, de quelque chose qui résiste – on n’a pas ce qu’il faut pour le dominer. Mais juste pour une seconde, quand tu as passé, c’était comme un éclair de... comme quand deux fils électriques se joignent et il y a une étincelle, comme ça. C’était une étincelle dorée, d’une lumière resplendissante, prrt ! et ça a jailli. Ah ! je me suis dit : bien ! C’était tout.

 

Alors après, quand tu m’as écrit que tu étais malade, je me suis dit : «Tiens-tiens ! qu’est-ce que ça veut dire ?» Je n’ai rien répondu, rien dit, mais quand je suis remontée là-haut et que j’ai commencé à marcher pour le japa, alors j’ai ramené cette expérience du Darshan – de ce moment du Darshan – et j’ai senti que ça avait laissé quelque chose (pas un effet total et absolu, mais laissé quelque chose), et à travers ça je me suis dit : je vais essayer qu’il aille mieux !

 

J’ai très bien senti l’intervention. J’étais vraiment mal fichu, et quand je suis sorti du japa, je savais que c’était fini. Il y a encore un petit reste à la jambe, quelque chose qui tire un peu, mais c’est pratiquement disparu.

 

Le souvenir. C’est le souvenir dans les cellules. Bien, c’est bon. Je suis contente. C’est la première expérience.

 

(Dans un autre Agenda, Mère fera cette remarque étonnante à Satprem, cela m'a tant frappé que je ne l'ai jamais oublié : maintenant, disait-elle, il faut que ton corps oublie qu'il a été malade, c'est la dernière étape de la guérison)  

 

La maladie avait commencé par un rêve bizarre : J’étais dans le couloir, ici, et un personnage assez sombre est venu me dire que Mère voulait que je change de travail. Et je me souviens, je mettais une force très grande pour essayer de dire à ce personnage: mais pourquoi, pourquoi donc ? Finalement tu es arrivée. Tu étais là, à une table avec diverses personnes. J’étais très ennuyé parce qu’il y avait tous ces gens qui me gênaient, qui semblaient m’empêcher d’être avec toi. Et tu me disais très clairement: «Il est temps que ce Monsieur s’en aille.»

 

Ce Monsieur désignait peut-être une partie de mon être qui devait disparaître ou changer, en tout cas tu me demandais de faire quelque chose qui était extrêmement difficile, je» sentais une très grande difficulté. Je me souviens même, dans mon rêve, t’avoir quittée un instant comme si je voulais quitter l’Ashram, puis j’ai dû marcher de long en large, enfin j’ai dû faire un effort énorme pour revenir m’asseoir près de toi, sur un banc qui, symboliquement, était très dur... Le lendemain je me suis réveillé avec la grippe.

 

Alors c’est très simple : la maladie, c’est qu’une partie de ton être est allée plus vite que l’autre. Probablement une partie de la conscience physique est restée en arrière et ça a créé ce déséquilibre, ça a déclenché la maladie.

 

(Un peu plus loin dans cet Agenda Mère donne ces indications :)

 

... ce chemin est très dur.

(silence) 

Et alors les choses ne se passent pas du tout comme elles se passent dans la vie ordinaire... mais pendant l’espace de trois, quatre minutes, quelquefois cinq minutes, dix minutes, je suis a-bo-mi-na-ble-ment malade, avec tous les signes que c’est fini.

(silence) 

Et c’est juste pour que je trouve le... que je fasse l’expérience, que je trouve la force. Et puis donner cette foi absolue au corps, de sa Réalité divine : que le Divin est là et qu’il veut être là et qu’il sera là. Et alors c’est seulement avec ces «moments-là», n’est-ce pas, où logiquement, selon la logique physique ordinaire, c’est fini, qu’on attrape la clef.

 

Il faut passer à travers tout ça sans flancher.

 

Je ne l’ai dit à personne, à personne jusqu’à présent, surtout pas à ceux qui prennent soin de moi, qui veillent sur moi, parce que je ne veux pas les... les épouvanter. Et que je ne suis pas sûre aussi de leurs réactions : tu comprends, s’ils commençaient à avoir peur, ce serait terrible. Je ne le dis pas. Mais c’est arrivé au moins cinq ou six fois, généralement le matin avant que je descende pour le balcon, là où je n’ai pas le temps... Et il faut que tout se fasse vite ! parce que je dois être prête à temps.

 

C’est très intéressant, très intéressant. Mais alors, n’est-ce pas, à ces moments-là, la... concreteness of the Presence (Le concret de la Présence) – c’est-à-dire concret à toucher, n’est-ce pas toucher matériellement, c’est extraordinaire !

 

Combien il en faudra encore comme ça ? Je n’en sais rien, n’est-ce pas, je suis en train de fabriquer le chemin.

 

(silence)

 

Tu n’écriras pas ces choses, efface-les, parce que... Plus tard je le dirai – quand ce sera fini, quand j’aurai trouvé le bout. Je ne veux pas que par hasard ça puisse tomber entre les mains de quelqu’un. Et toi, tu le gardes comme ça, dans ta conscience.

 

(silence)

Je te dis tout cela à cause de ce qui vient d’arriver l’autre jour. C’est avec ces expériences-là qu’on acquiert... le vrai Pouvoir.

Hibiscus rosa-sinensis - Hibiscus de Chine - Foi

Hibiscus rosa-sinensis - Hibiscus de Chine - Foi

Dans l'Agenda du  13 décembre 1960 Mère reviendra sur le sujet et apportera quelques indications supplémentaires.  

 

Tous ces jours-ci, j’étais en présence d’un problème vieux comme le monde et qui avait pris une acuité extraordinaire.

 

C’était, dans la conscience physique la plus matérielle, ce que Sri Aurobindo appelle le disbelief (incrédulité) – ce n’est pas le doute (le doute appartient surtout au Mental), c’est presque le refus d’admettre ce qui est évident dès que ce n’est pas la petite routine quotidienne des sensations et des réactions ordinaires: une sorte d’incapacité d’admettre et de reconnaître l’exceptionnel.

 

Ce disbelief, c’est la base dans la conscience. Et puis c’est accompagné d’une... (on appelle cela «pensée», mais c’est un grand mot pour une chose tout à fait ordinaire) d’une activité mentale-physique qui vous fait (on est bien obligé d’employer le mot), qui vous fait «penser» les choses, et qui toujours prévoit, imagine ou conclut (cela dépend des cas) d’une manière que, moi, j’appelle DEFAITISTE ; c’est-à-dire que, automatiquement, ça amène l’idée de toutes les choses mauvaises qui peuvent arriver.

 

Et cela, dans un domaine tout à fait à ras de terre, dans la vie la plus ordinaire, restreinte, banale : quand il s’agit de manger, de bouger, de... Bref, les choses les plus vulgaires.

 

Dans le domaine de la pensée, c’est assez facile à régler et à maîtriser, mais ces réactions qui viennent de tout en bas... c’est si petit qu’on a de la difficulté même à se l’exprimer à soi-même. Par exemple, on vous dit : «Untel a mangé telle chose», eh bien, aussitôt, il y a quelque part quelque chose qui insinue : «Ah! ça va lui donner mal à l’estomac !» Ou bien : «Celui-ci va à tel endroit» – «Oh ! il va lui arriver un accident»... Et pour tout c’est comme cela, grouillant par terre. Rien à voir avec la pensée véritable !

 

C’est une très sale habitude parce que cela conserve cet état le plus matériel dans une condition de désharmonie, de désordre, de laideur et de difficulté.

 

J’ai essayé tous les moyens possibles... Se sortir de là, c’est relativement facile. Mais alors ça ne change pas.

 

Les problèmes se sont représentés à moi d’une façon tout à fait aiguë quand j’ai lu le Yoga of self-perfection de Sri Aurobindo. J’ai été mise en présence d’un monde formidable de transformation – transformer tout ce qui est déjà lumineux c’est bien facile, mais transformer ça !... ouf ! ce tissu, si bas, si vulgaire, si ordinaire, de la vie – c’est beaucoup plus difficile. (1)

 

Et ces jours-ci, pendant plusieurs jours, j’étais aux prises avec ça, luttant contre ça : comment empêcher cet automatisme imbécile, vulgaire, et défaitiste surtout, de se manifester tout le temps ? C’est vraiment un automatisme : ça ne répond à aucune volonté consciente, rien. Et qu’est-ce qu’il faut pour...? Et c’est en relation tout a fait étroite avec les maladies du corps (ces habitudes mauvaises qu’a le corps de sortir de son mouvement rythmique, d’entrer dans une confusion), les deux choses se tiennent très étroitement.

 

Je suis en plein dans le problème.

 

Pour moi, «problème» ne veut pas dire expliquer la chose (c’est facile à expliquer), mais: contrôle, maîtrise et transformation. Ça va prendre un peu de temps.


 

(1) Plus tard, Mère a ajouté ceci : «A propos, quelque part, je ne sais plus où, Sri Aurobindo a parlé de cela, de ce Mental physique, et il a dit qu’il n’y avait rien à en faire : il n’y a qu’à le détruire.»

Mère fait peut-être allusion au passage suivant de La Synthèse des Yoga : «II n’y a rien à tirer de cet élément volage, violent, agité et troublant ; il n’y a qu’à s’en débarrasser soit en le détachant du reste pour le réduire ensuite à l’immobilité, soit en donnant une concentration et une sincérité suffisantes à la pensée pour qu’elle rejette d’elle-même ce troublant étranger.» (Vol. xx, p. 300, Cent, éd.)

Dans des Agendas ultérieurs, Mère expliqua que cet élément apparemment impossible à transformer, grâce au mantra et au japa, petit à petit, pouvait non seulement se transformer, mais devenir un agent précieux du processus. 

Que le monde change, que la situation s'améliore, nous le voulons tous, et toutes les générations avant nous. La fantastique la leçon de chose de Mère est d'avoir découvert que les obstacles se cachent précisément dans des toutes petites choses apparemment insignifiantes cachées dans le fonctionnement de notre conscience cellulaire.

Et c’est surtout cela, ce sens de l’«important» et de ce qui n’est «pas important» : ça, c’est une chose qui s’évanouit, qui ne laisse aucune trace. On est comme ça, avec... rien. Il n’y a pas d’échelle dans l’importance ; ça, c’est absolument notre imbécillité mentale : ou rien n’est important ou tout est également important. Le grain de poussière, là, qu’on essuie, ou la contemplation extatique – c’est TOUT PAREIL. (Agenda du 17 décembre 1960)

*

Et quand je marche là-haut pour mon japa, c’est très intéressant, parce que toutes sortes de formations mentales viennent en flèche (Mère dessine des petites flèches dans l’air, qui viennent de tous les côtés toucher son atmosphère mentale) ; et pourtant là, je suis tout entière dans ce que je pourrais appeler la joie, le bonheur de mon japa, avec l’énergie de la marche (la marche est là pour donner une énergie matérielle à l’expérience, dans toutes les cellules du corps).... (Agenda du 20 décembre 1960)

*

Voilà qui termine les partages du Tome 1 de L'Agenda, les années 1950-1960. En tout cas, si nous parvenions à chasser petit à petit cette incrédulité défaitiste de notre conscience physique, corporelle, cela aurait des conséquences incalculables... 

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