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Publié par pascalemmanuel

Une interview très intelligente de Michel Maffesoli avec laquelle je propose trois liens :

1) Avec ce que dit de Mère de la France dans l'Agenda du 3 juillet 1963 à propos de  l'esprit clair, précis ; du raffinement de la pensée, du goût, et de la clarté d'esprit – il n'y a pas de pays au monde comme cela. Il n'y en a pas.

2) Quand il évoque la violence inhérente à la nature humaine, avec ces paragraphes du chapitre 6 d'Essai sur la Guîtâ, L'homme et la bataille de la vie dans lequel Sri Aurobindo parle de la guerre :

L’ancienne civilisation indienne attachait une importance particulière à la nature individuelle, sa tendance, son tempérament, et cherchait à en déterminer le type éthique, la fonction et la place dans la société.

De plus elle ne considérait pas l’homme comme un être surtout social ni la plénitude de son existence sociale comme le plus haut idéal ; elle voyait plutôt dans l’homme un être spirituel en cours de formation et de développement et tenait sa vie sociale, sa loi morale, le jeu de son tempérament et l’exercice de sa fonction comme des moyens et des degrés de sa formation spirituelle.

La pensée et la connaissance, la guerre et le gouvernement, la production et la distribution des richesses le travail manuel et le service constituaient des fonctions sociales soigneusement différenciées, chacune étant assignée à ceux qui y étaient naturellement appelés et assurant le juste moyen par lequel chacun individuellement pouvait avancer sur la voie du développement spirituel et du perfectionnement de soi.

*

Certes l’idée moderne d’une obligation commune dans tous les principaux départements de l’activité humaine a ses avantages   : elle favorise la solidarité, l’unité et la plénitude dans la vie de la communauté et le développement dans toutes les directions de l’être humain complet, en opposition avec la division sans fin et la sur-spécialisation du travail et avec un rétrécissement et une limitation artificielle de la vie de l’individu auxquels conduisit finalement le système indien.

Mais elle offre aussi des inconvénients et, dans certaines conséquences de ses trop logiques applications, elle a mené à des absurdités à la fois grotesques et désastreuses. Cela est suffisamment évident dans le caractère de la guerre moderne.

Partant de l’idée d’une commune obligation militaire, liant chaque individu, de se battre pour défendre la communauté dont il vit et profite, est né le système par lequel tout homme de la nation est jeté dans la tranchée sanglante pour tuer ou être tué ; penseurs et artistes, philosophes, prêtres, marchands et artisans, tous arrachés à leurs fonctions naturelles, la vie entière de la communauté désorganisée, la raison et la conscience foulées aux pieds, le ministre de la religion lui-même, appelé par ses fonctions ou par l’État, qui le paye, à prêcher l’évangile de paix et d’amour, forcé de renier sa foi et de devenir le boucher de ses frères !

Non seulement les décrets arbitraires de l’État militaire violent la conscience et la nature, mais la défense nationale, poussée à des extrémités insensées, fait de son mieux pour devenir un suicide collectif.

*

La civilisation indienne au contraire s’est toujours proposée de réduire au minimum les atteintes et les désastres de la guerre. Dans ce dessein, elle limitait l’obligation militaire à la seule classe peu nombreuse qui était destinée à cette fonction par sa naissance, sa nature et ses traditions, et qui y trouvait ses moyens naturels de développement par l’épanouissement en leur âme des qualités de courage, de force disciplinée, de désintéressement secourable et de noblesse chevaleresque auxquelles la vie de soldat, sous la contrainte d’un haut idéal, offre un champ et des occasions.

Les autres membres de la communauté étaient de toutes manières protégés contre le meurtre et l’outrage ; leur vie et leurs occupations étaient contrariées aussi peu que possible.

Il n’était laissé aux tendances combatives et destructrices de la nature humaine qu’un terrain restreint, une sorte de champ clos, de façon à causer le minimum de dommage à la vie générale de la race, tandis qu’en même temps la fonction guerrière, soumise qu’elle était à des hauts idéaux éthiques et à toutes les règles possibles d’humanité et de chevalerie, était contrainte d’aider à ennoblir et à élever ceux qui l’exerçaient, au lieu d’encourager leur brutalité.

Il faut se rappeler que c’est une guerre de cette espèce, soumise à ces conditions, que la Guîtâ envisage — une guerre considérée comme une partie inévitable de la vie humaine, mais restreinte et réglementée de façon à servir, aussi bien que les autres activités, au développement spirituel et moral qui était alors regardé comme le but entier et réel de la vie —, une guerre destructrice, dans certaines limites soigneusement fixées de la vie corporelle de l’homme individuel, mais constructrice de sa vie intérieure et de l’élévation morale de la race.

Que la guerre ait dans le passé, lorsqu’elle était soumise à un idéal, aidé à cette élévation, comme dans le développement de la chevalerie, dans l’idéal indien du kshatriya, dans l’idéal japonais du samouraï, ne peut être nié que par les fanatiques du pacifisme.

Sa fonction accomplie, elle peut alors disparaître ; car si elle essayait de survivre à son utilité, elle apparaîtrait comme une pure brutalité, une violence privée de son idéal et de son aspect constructif, et serait rejetée par l’esprit humain en progrès. Mais il faut reconnaître les services passés qu’elle a rendus à la race, pour se faire une juste vue de notre évolution.

*

Le fait physique de la guerre, cependant, n’est qu’une manifestation particulière et extérieure d’un principe général de la vie, et le kshatriya n’est que la manifestation extérieure et le type d’un caractère général nécessaire à l’intégralité de la perfection humaine.

La guerre reproduit et incarne physiquement l’aspect de bataille et de lutte qui appartient à toute vie, à la fois à notre vie intérieure et à notre vie extérieure, dans un monde dont la méthode est la rencontre et le combat des forces ; par une mutuelle destruction ces forces progressent vers un ajustement continuellement changeant, exprimant une progressive harmonisation et visant à une parfaite harmonie qui repose elle-même sur quelque potentialité encore incomprise de l’unité.

Le kshatriya est le type et l’incarnation humaine du combattant, qui accepte ce principe de vie et lui fait face, tel un guerrier s’efforçant vers la maîtrise et ne reculant pas devant la destruction des corps et des formes, mais dont le but à travers tout est de réaliser certains principes de droit, de justice et de loi, sur quoi se fondera cette harmonie vers laquelle tend toute la lutte.

La Guîtâ accepte cet aspect de l’énergie universelle et le fait physique qui l’incarne   : la guerre, qui est l’extrême contradiction de la haute aspiration de l’âme vers la paix à l’intérieur et la non-violence au-dehors.

Elle s’adresse à l’homme d’action, au lutteur et au combattant   : le kshatriya, nécessairement plongé dans un tumulte de combats et d’actions qui paraît la contra- diction même du haut idéal de l’âme de calme maîtrise et d’empire sur soi. Et pour résoudre la contradiction, la Guîtâ cherche un point où ses deux termes s’uniront et un équilibre qui sera la base essentielle de cette harmonie et de cette transcendance.

Nous trouvons dans ces paragraphes des idées qui ressemblent beaucoup à ce qu'évoque Michel Maffesoli dans cette interview. Et puis, chacun ressent les choses à sa façon mais il me semble que dans notre société moderne occidentale, les vertus guerrières et martiales ont beaucoup été moquées, les militaires, les anciens combattants, les forces de l'ordre ayant bien mauvaise presse, alors qu'est volontiers mis en avant une idéologie pacifiste et non-violente. Le seul guerrier admis et valorisé dans culture est le guerrier pacifiste.

Michel Maffesoli nous montre qu'il y a là quelque chose qui ne va pas et qui se retourne contre nous. En effet, il est très lucide sur le fait qu'une société qui ne sait pas prendre en compte cette violence inhérente à la nature humaine se dirige vers une violence plus grande encore. C'est intéressant et ouvre tout un champ de réflexion indivuel et collectif.

3) Et enfin, si je ne passe pas ma vie derrière internet à écouter ce que les penseurs disent de notre système politique, je n'ai jamais entendu un seul intellectuel qui remette en cause si calmement et si ouvertement notre régime dit "démocratique". Voilà qui rappelle cette parole forte de Mère dans L'Agenda du 16 août 1969 : La Démocratie était nécessaire et utile il y a une centaine d’années, mais maintenant elle doit être dépassée si l’on veut faire un pas en avant vers une création nouvelle.

Ainsi, comme l'a annoncé Mère, une fois de plus il me semble que ces exemples confirment que la pensée de Sri Aurobindo continue de se répandre sur le monde...

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